dimanche 12 avril 2020

(Lectures) L'histoire hors du commun d'une personne ordinaire, Alain Diblan

Publié en 2012
Editions Mon petit éditeur








Pour fuir en 1871 la répression après la chute de la Commune de Paris, où elle s'était illustrée aux côtés de Louise Michel, Marguerite se retrouve à Londres comme cuisinière. Un geste regrettable la conduit à fuir à nouveau. Recherchée, elle sera arrêtée et condamnée. Au-delà de l'histoire du destin de cette femme, on découvre la collaboration des polices anglaise et française, les problèmes diplomatiques liés aux formalités d'extradition, la conduite du procès en Angleterre et par-dessus tout le rôle de la presse dans une affaire qui passionna les foules... Toute une époque, déjà loin de nous, mais cependant encore tellement actuelle. 

⭐⭐⭐⭐⭐

Alain Diblan nous offre, avec ce livre, un ouvrage d'une grande richesse et très bien écrit. Je ne vais pas y aller par quatre chemin : ce livre est un coup de cœur ! 
Ce livre rassemble plusieurs genres littéraires : l'essai historique, la biographie romancée mais aussi un passionnant polar. Vous vous imaginez donc bien que ce livre est complet et plus que captivant. 

A travers ce livre, l'auteur nous invite à découvrir la personne de Marguerite Diblanc (ou Dixblanc), une jeune femme belge qui a eu un destin hors du commun. Alors qu'elle n'est qu'une toute jeune fille, sa famille et elle quitte la Belgique, la vie étant devenu trop difficile. Ses parents et ses frères et sœurs s'arrête à Verdun, alors qu'elle continue vers la capitale. Là, entourée de compatriotes, elle subit la défaite de 1870, contre la Prusse, puis la révolution menant à la création de la Commune de Paris, puis la répression. Cette dernière l'obligera à fuir en Angleterre où finalement elle serait engagée en tant que cuisinière par Madame Riel. Cette française tyrannique avec ses employés et au caractère sanguin, est la maîtresse de Lord Lucan. La fille de celle-ci, Julie, est actrice. Le caractère emporté de Marguerite et sa soif de liberté ne supporteront pas longtemps les remontrances et insultes de Madame Riel, sa patronne. Un dimanche, l'impensable se produira : Marguerite tuera sa patronne avant de prendre la fuite pour la France, avec pour projet de partir en Amérique et reconstruire sa vie. Mais très vite soupçonnée de ce meurtre, Marguerite recherchée par la police française et Scotland Yard finira par être arrêtée... 

Ce livre est vraiment passionnant, tant pour le côté historique (guerre contre la Prusse, Commune de Paris, répression, relations/traité d'extradition entre la France et l'Angleterre mais aussi l'Angleterre et la Belgique, le déroulement d'une enquête et d'un procès à l'époque...) que pour le côté polar et biographie. 
Marguerite Diblanc est une personne ordinaire (comme le titre nous le dit). Je veux dire par-là qu'elle ressemble à beaucoup de gens de l'époque. Certes elle s'engage très tôt pour défendre ses croyances, n'hésitant pas à monter sur le barricade, mais tout au long de ma lecture je me suis dit "ça aurait pu être moi !". Elle a tué, sous le coup de l'émotion, de la colère, à la suite de semaines d'insultes, d'humiliation... 
Bien sûr que ça ne pardonne pas son geste, mais doit-on la haïr pour ce qu'elle a fait et ignoré tout cela ? Je vous avouerais une chose, je me suis vraiment attachée à Marguerite, qui n'est pas une mauvaise fille. Son destin m'est devenu précieux. 
J'ai vécu le procès difficilement car ne parlant que très peu et très mal, voir pas du tout l'anglais, les débats, les accusations n'étaient que peu compréhensible par notre héroïne. 

A travers l'histoire de Marguerite, Alain Diblan dresse le portrait d'une époque, d'une société en construction... 
L'enquête policière, le procès, la condamnation ; tout les détails, toutes les erreurs, toutes les bizarreries nous sont dévoilées. Ce livre, bien que se lisant comme un roman, est un magnifique et palpitant document sur une société, sur les relations internationales entre plusieurs pays... 
Cet ouvrage passionnera tous ceux qui aiment l'histoire, les polars, le biographie. C'est bien écrit, bien documenté et, je tiens à souligner l'énorme travail de recherche de l'auteur.


vendredi 3 avril 2020

(Lectures) Les loyautés, Delphine de Vigan

Publié en 2018
Editions JC Lattès





Les coups je les ai reçus et le secret je l’ai gardé jusqu’au bout. 

Les destins croisés de quatre personnages : Théo, enfant de parents divorcés ; Mathis, son ami, qu'il entraîne sur des terrains dangereux ; Hélène, professeur de collège à l'enfance violentée, qui s'inquiète pour Théo ; Cécile, la mère de Mathis, qui voit son équilibre familial vaciller. Une exploration des loyautés qui les unissent ou les enchaînent les uns aux autres. 

⭐⭐⭐⭐⭐

Une nouvelle nuit d'insomnie et allez savoir pourquoi, j'ai eu une brusque envie de lire ce roman. Le dernier Delphine de Vigan, mon second de l'auteur (j'avais beaucoup aimé No et moi). Je l'avais dans ma Pile à lire depuis quelques temps, je ne savais même pas de quoi il parlait ce bouquin, mais il m'appelait. Je l'ai ouvert donc et une heure et demi plus tard, je le refermais, achevé. Quelle claque que ce récit ! 

On y suit plusieurs personnages : des enfants (Théo et Mathis, deux amis, deux ados en souffrance chacun à leur manière) et des adultes (Cécile la mère de Mathis et Hélène la prof des deux enfants, qui s'inquiète fortement pour Théo, mais aussi quand même les parents de Théo). 
Je me suis énormément attaché à Théo, que j'ai tout de suite voulu protéger (est-ce mon rôle de maman qui m'a fait agir ainsi à son égard ? ). Cet enfant en grande souffrance, qui ne trouve de l'écoute et de l'aide nulle part et qui doit, malgré ses 12 ans porter des choses qui sont beaucoup trop lourdes. 
Et comme j'ai aimé Hélène, comme j'aimerai que tous les professeurs soit comme elle, attentive et bienveillante envers ses élèves, même si cela l'entraîne à parfois dépassé les limites que lui autorise ses supérieurs. 

Plusieurs heures déjà que j'ai terminé cette lecture et je suis toujours sous le choc de la puissance de ce roman, je suis encore hors d'haleine, hanté par cette histoire et ses personnages. 
Je n'arrête pas de réfléchir à la brièveté de la vie et au fait que nos blessures, nos souffrances, agissent malgré nous sur notre vie et celles des autres, celles de notre entourage, leur imposant des choses lourdes à porter, qui ne sont même pas à eux. 
Et puis, je réfléchi aussi au fait que l'on ne se regarde plus vraiment, nous les êtres humains trop englués dans nos soucis pour faire attention à la détresse d'autrui. 
Je réfléchi également à la fragilité des ados, au fait que leur silence entraîne parfois le pire. Un aller sans retour. 
Delphine de Vigan, de sa plume magnifique et puissante, nous livre ici un roman poignant et brutal, un récit qui torture mais qui pousse à ouvrir nos yeux et à regarder au-delà de notre nombril. Je vous conseille ce court récit qui est un coup de cœur !